La peste frappe Bristol en cet an de grâce 1350. Montez dans une charrette et tentez de sortir de la ville avant que les portes ne se referment sur les malades comme les personnes saines, et si vous attrapez la terrible maladie, cachez-le eux autres et … partagez vos bubons !
Bristol est un jeu à rôle caché. Le rôle oui, mais la fourberie, les accusations et les mensonges eux seront bien visibles ! Le jeu fait partie d’une gamme très intéressante de jeux très interactifs et avec des boites ressemblant à des anciens livres. C’est super joli, ça rend tellement bien en dehors de la ludothèque que même votre conjoint(e) pas très fan de la kallax au milieu du salon sera sous le charme de ces livres-jeux.
L’éditeur est Facade Games (Ils n’ont pas dû chercher longtemps le nom après avoir trouvé le concept), un éditeur américain qui finance les jeux via des campagnes Kickstarter. Pour l’auteur, Travis Hancock, il est l’heureux papa de toute la gamme des Facade Games, et aux pinceaux on trouve Holy Hancock et Sarah Keele qui n’ont officié que sur ces jeux.
On est donc sur un mini projet, mais les bons jeux trouvent toujours le moyen d’arriver jusqu’à nous, et cette fois c’est Lucky Duck Games qui se colle à la traduction.
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Alors, qu’est ce qui se cache dans ce Bristol du Moyen Age où débute une vague de peste ?
Dans la boite se trouvent 3 chariots de 3 places chacun, 9 pions, 6 dés, des cartes et un plateau en néoprène ce qui est bien pratique pour le rouler dans la boite et c’est toujours agréable un plateau en néoprène.
Avec ça vous allez pouvoir jouer et surtout vous déchirer de 1 à 9 joueurs pendant une petite demi-heure. Pour débuter, chacun choisit un personnage, mais surtout une couleur, et on tire les pions au hasard pour les placer de façon équitable dans les chariots. On peut déjà parler du nombre de participants pour une partie réussie : à moins de 6, je trouve que le jeu manque cruellement de relief, c’est au final un jeu d’ambiance, il faut du monde pour que la mayonnaise prenne et que l’ambiance monte. J’ajouterai qu’en revanche, de 6 à 9 joueurs, vous êtes avec un jeu qui tourne parfaitement, les tours sont rapides et, de toute façon, l’action faite par chacun est suivie par tous les autres avec commentaires, conseils et tentatives d’influence.
Les joueurs piochent chacun 2 cartes symptômes avec des valeurs de 1 à 3, fièvre, toux ou frissons au programme. Ces cartes doivent rester cachées elles définissent si vous êtes pesteux ou pas durant la partie ! Si la somme des 2 cartes que vous avez en main atteint ou dépasse 6 vous voilà contaminé !
Attendez… dépasser 6 ? Eh oui ! Une fois la mise en place faite et 2 cartes données à chaque joueur, on ajoute des cartes 4, les fameux bubons très à la mode à l’époque, au paquet. Désormais il sera possible de récupérer une carte 4 qui augmente drastiquement les chances d’être pesteux ! Mais reprenons le cours de la partie :
Une fois que tout le monde est en voiture, le jeu commence par le lancé des 6 dés représentant les 3 couleurs de chariot avec sur chaque face soit un rat soit une pomme. On a donc 3 rats (un de chaque couleur) et 3 pommes (même punition) sur les dés. À la fin de la manche chaque charrette va avancer d’autant de cases que le nombre des dés à sa couleur, il vaut mieux donc être dans le bon chariot pour espérer sortir de la ville ! Mais attention si à la fin d’une manche vous êtes dans un chariot dont 2 dés ou plus indique des rats il y a contamination. Les joueurs mettent leurs 2 cartes symptômes au centre de la table (face cachée bien entendu) et on ajoute une carte de la pioche, on mélange fermement et on redistribue 2 cartes à chacun. La carte restante est défaussée face cachée (restons discrets). Chacun prend alors connaissance de son nouveau « total » de symptômes et voit s’il est désormais condamné.
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Tout est là ! Être dans le chariot qui avance, ne pas choper le virus et espérer sortir vite de la ville, au moins plus vite que les autres.
Bien évidemment les joueurs agissent en effectuant 1 action à chaque manche. Ils peuvent piocher une carte remède proposant 2 actions parmi 6, il sera possible d’en effectuer une des deux (action gratuite) par la suite. Vous pouvez également relancer 2 dés de votre choix pour tenter d’obtenir des pommes à la couleur de votre chariot histoire d’avancer vite et sainement.
Sinon vous pouvez vous déplacer :
- Dans votre chariot, si vous n’êtes pas à l’avant. Vous bousculez tout le monde pour vous retrouver à l’avant.
- Vous pouvez sauter dans le chariot qui se trouve devant vous et ainsi espérer sortir de cette maudite ville. Si le chariot a une place libre, vous la prenez, sinon vous éjectez le pion à l’arrière de ce chariot qui montera à l’arrière du chariot que vous venez de quitter. Pas d’ami qui tienne quand il s’agit de sauver sa peau !
- Enfin, vous pouvez éjecter quelqu’un de votre chariot. Son pion doit se trouver plus en arrière que vous dans le chariot. Le pion éjecté monte à l’arrière du chariot suivant. Et s’il est éjecté du dernier chariot ? Il est tout simplement éliminé ! Allant mourir dans une ruelle sombre. Mais attention, car le joueur révèle s’il était sain ou non, et si c’est le cas la personne qui l’a éjecté, prise de remords est alors éliminée également ! De quoi vous faire réfléchir avant de vous entretuer dans le dernier chariot.
Un gameplay simple et des actions rapides pour des tours également rapides même à plus de 6 ou 7 joueurs. De toute façon, vous allez surveiller les autres et ce qu’ils font à leur tour au cas où ils tentent de vous dépasser ou vous remplacer en sautant dans votre chariot. Les lancers de dés sont également très commentés avec moqueries, mauvaise foi et chougne au programme ! Bref, que du bonheur.
Quand un chariot sort de la ville, c’est (peut-être) la fin de la partie ! Ses occupants annoncent alors s’ils sont pesteux ou sains. Bien entendu, toute personne qui a été pesteuse à un moment de la partie le reste, même si en sortant le total de ses cartes ne fait pas 6. Je vous passe le couplet sur les tricheurs mais le livret de règles ne plaisante pas avec eux ! Un bannissement est prévu, c’est dire si l’affaire est sérieuse.
Donc 2 cas de figure dans le chariot :
- Tout le monde est sain. Bravo, ces joueurs emportent la partie ! Les portes de la ville sont ensuite fermées et les joueurs des chariots suivants condamnés à une mort certaine, affreuse mais avec de jolis bubons !
- Il y a au moins un pesteux dans le chariot : on crame tout ! Les sains, les pesteux, tout y passe ! Les joueurs de ce chariot sont donc éliminés. Et il ne reste qu’une seule manche pour qu’un autre chariot sorte de la ville. Ça va ruer dans les brancards pour les joueurs restants !
Dans le cas d’une ultime manche, si un autre chariot atteint la sortie, il subira le même test que le premier avec victoire ou flambée pour ses occupants.
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Donc deux moyens de gagner : une victoire éclatante et sans appel si vous êtes sain et que vous parvenez à sortir de Bristol.
Une victoire un peu piteuse si vous êtes pesteux et qu’aucun joueur sain ne parvient à atteindre la sortie, ou du moins sans brûler.
Bristol, c’est la fin de belles amitiés en quelques minutes ! C’est des « ohhhh », des « noooonnnn » et des « mais pourquoi ? » dignes des meilleurs films. Quand les joueurs en viennent à rappeler des liens de parenté, d’amitié ou encore « c’est moi qui ai les clefs de la voiture », c’est que l’on est en présence d’un jeu qui cartonne non ?
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Le jeu souffre de quelques problèmes. J’ai déjà évoqué le nombre de joueurs minimum, personnellement ce n’est pas vraiment un problème une fois que l’info est connue, mais bon, si vous le voulez pour jouer à 2, ça peut se révéler assez plat et fade.
Le matériel est bien chouette mais les pions sont si petits ! Leur manipulation requiert presque une pince à épiler ! Surtout quand on est maladroit avec des saucisses à la place des doigts.
Enfin les cartes de personnage où la couleur du pion est le vêtement du personnage avec des rappels minuscules dans les coins. Et la police en taille 4 n’est pas des plus pratique pour rappeler les actions possibles (piocher un remède, lancer deux dés ou bouger). Rien de rédhibitoire, juste des choses un peu inadaptées.
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Avec tout cela, Bristol vous promet de très bons moments de jeu avec pas mal de rigolade, et je l’ai par exemple adoré en famille où des non joueurs se sont pris rapidement au jeu et m’en reparlent après la partie. C’est fou comme quoi éjecter ses parents de son chariot peut jouer sur un héritage…
Vous l’aurez compris, une fois dans la bonne configuration, avec Bristol vous avez un moteur à rigolade et c’est ce que l’on cherche quand on est nombreux autour de la table.
Pour l’âge des joueurs, il faut pouvoir gérer cette frustration pour que la chougne ne devienne pas de la bouderie tout simplement.
Bristol, c’est un beau petit jeu par la taille et le design mais un grand jeu par le nombre de participants et les émotions qu’il vous apportera.
Alors, sortez les chariots et arrêtez de tousser, on repart pour un tour !
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L’avis de Laurent Lecomte :
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Un concept qui a tout pour me plaire (un jeu d’enfoirés avec « identités » cachées), une tablée idéale de potes (8 de mémoire) déjà chauffés à blanc et des attentes minimums, autant dire je partais très confiant quand je me suis lancé dans ma première partie de Bristol.
Et plouf le jeu…
Bristol est la preuve flagrante que la somme de bonnes (voire très bonnes) idées ne résulte pas nécessairement en un jeu intéressant. Il faut se rendre à l’évidence, aussi paradoxal que cela puisse paraître, Bristol n’est pas fun pour un sou. Et pourtant c’était la promesse, et dès lors, tout ce qu’on lui demandait. Ni plus ni moins !
La faute à quoi ? À première vue, il semble difficile d’identifier exactement pourquoi la sauce ne prend pas. Et pourtant c’est un peu comme le nez au milieu du visage. Pourquoi ? Parce qu’il s’agit en fait d’une somme d’erreurs de design qui, prises individuellement, ne constituent pas un problème en soi mais dont la somme provoque l’implosion du gameplay et annihile tout élan de fun factor. Un peu comme en cuisine : même avec les meilleurs produits, certains accords ne fonctionnent tout simplement pas, à fortiori si ces derniers ne sont pas en plus un minimum maîtrisés. Concrètement, les leviers à la disposition des joueurs ne sont tout simplement pas à la hauteur du chaos engendré. Ceci enlève tout intérêt à un espace décisionnel déjà fort étriqué. En d’autres mots, on est témoin plutôt qu’acteur et ce, d’une série Z. Le plus triste est que la dimension shared incentives à géométrie variable (les chariots et leurs hôtes) qui aurait dû être le cœur du jeu et faire toute son originalité, se retrouve aux abonnés absents de par sa volatilité mal encadrée niveau règles. En résumé, on ne contrôle pas grand chose et pire, on s’en fout.
Et ça, c’est avant d’être contaminé. Après vous vous doutez bien que c’est encore bien pire. On passe alors d’un ennui poli et un minimum dissimulé à « je ne fais même plus semblant de m’intéresser à ce qui se passe hors de l’écran de mon smartphone ». Une fois pestiféré, on est supposé essayer de contaminer les autres joueurs afin que tout le monde perde et probablement se sentir moins seul. J’en ris encore. Et là, on ne peut que pointer l’hypocrisie des auteurs. « Player elimination », ça fait tache de nos jours dans une règle. Mais est-ce vraiment pire que de continuer à « jouer » en mode zombie sans motivation aucune ? Perso j’aime autant gérer un bot de Turczi…
Bref, rien ne va et à ce niveau tout est raccord. Bristol est en fait une mise en abîme de son propre thème. Prenez le premier chariot dispo et fuyez au risque de choper ce livre maudit !
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Prix constaté : 24,90 €