Test : Time of Empires

Test : Time of Empires

Critique rédigée à l’aide d’un jeu fourni par l’éditeur.

Le temps, en pire

Entre Time of Empires (ToE) et Black Angel, le précédent gros titre de Pearl Games, on assiste à un virage à 180°. Black Angel avait des mécaniques très proches des succès du studio (Troyes et Tournai) et des illustrations très originales (et clivantes) signées Ian O’Toole. ToE, lui, a une identité graphique beaucoup moins marquée mais un concept mécanique bien plus original.

Si Time of Empires dénote parmi les sorties actuelles, au moins il est simple à décrire. Prenez un jeu de civilisation (expansion géographique, conflits entre joueurs et avancée technologique) et faites gérer toutes ses actions par une mécanique classique de placement d’ouvrier. Imaginez maintenant qu’on remplace les meeples habituels par des sabliers. Voilà, vous avez ToE.

l

A la recherche du temps perdu

Le fait que tout soit chronométré -les actions par les sabliers mais aussi la durée des manches via une application mobile- change complètement la donne en termes de sensations. Le moins qu’on puisse dire c’est qu’elles sont intenses. L’impression d’urgence ne nous quitte pas durant toute l’heure que dure la partie.

Malheureusement, sensations fortes ne riment pas forcément avec bonnes sensations. En ce qui me concerne, cela a même été l’inverse. La course contre le temps imposée par le jeu m’a épuisé, aussi bien mentalement que physiquement. Les amateurs d’adrénaline vont sans doute apprécier. Moi, j’ai juste eu le sentiment que le jeu me bousculait en permanence, me rappelant un peu le métro 13 aux heures de pointe. Loin d’être le meilleur souvenir de mon ancienne vie parisienne.

Même en cours de jeu, cette pression temporelle permanente a des effets néfastes. La panique provoque des erreurs, des maladresses, qui m’agacent. Même la victoire ne nous semble pas justifiée quand on ne nous laisse pas le temps de faire les choses correctement.

l

Pas si société

Je ne mettrai jamais les pieds sur les serveurs de Fortnite ou de League of Legend. Me faire insulter en russe par des minots de 15 ans n’étant pas vraiment ma définition d’une bonne soirée. Par contre, dans le jeu de société, j’aime interagir avec les joueurs. Parce qu’en face à face, on a moins tendance à oublier qu’on s’adresse à un être sensible mais aussi parce qu’on a le temps. On prend des nouvelles quand ce n’est pas à nous de jouer.  On se plaint d’un joueur trop agressif ou trop en avance. On se moque gentiment de Roger* dont le tour prend plus de temps que tous les autres réunis. Time of Empires interdit tout ça. Même pendant la pause entre les manches, on profite de ce répit pour souffler un peu et scruter la situation des autres joueurs et tout ce qu’on a pu manquer pendant le déroulé frénétique du tour.

Je dois confesser que pour le test de ToE, j’ai réduit le nombre de parties jouées au strict minimum. J’ai bien conscience que c’est un jeu qui s’apprivoise. Qu’après quelques parties, on doit pouvoir s’adapter à son tempo original mais rien, dans mes premières expériences, ne me donne envie d’y revenir.

Ce n’est pas parce que Time of Empires offre une expérience originale qu’elle est forcément plaisante. Lorsque le concept d’un jeu repose entièrement sur une course contre la montre, il faut s’attendre à ce que cela ne convienne pas à tout le monde. Les amateurs de jeux de stratégie temps réel comme Starcraft y trouveront peut-être leur compte. Ça n’a pas été mon cas.

*Afin de préserver son anonymat, le prénom a été modifié.

l

Disponible ici :

Prix constaté : 72 €

Test : Endless Winter

Test : Endless Winter

J’avais eu l’occasion de jouer à Endless Winter il y a plus de 2 ans, lorsque j’avais reçu un proto de la part de l’éditeur juste avant le début de la campagne de financement sur Kickstarter. Je me rappelle à l’époque avoir eu le sentiment d’un jeu correct, mais pas mémorable. La localisation française est dorénavant disponible en boutiques, et j’ai pu jouer à cette version définitive.

Mon avis sur ce jeu a-t-il changé en 2 ans ? Intègrera-t-il ma ludothèque ?

Petit retour en arrière sur ce que j’en avais dit à l’époque (et pour voir si je ne fais pas la girouette ^^), ça se passe ici.

Et maintenant, retour dans la vraie vie, avec un vrai jeu (on l’espère) :

plein de matériel, belle qualité pour 60€ (la giga-table n’est pas fournie dans la boite, peut-être dans une extension à venir ^^ )

l

L’effet oignon

Voilà on attaque direct avec une bonne blague, ça m’a aussitôt fait penser à l’effet papillon, un superbe film d’ailleurs que je vous conseille. Rien à voir mais n’hésitez quand même pas à le regarder.

La 1ère chose qui frappe avec Endless Winter, c’est la profusion de plateaux, de zones de jeux, et la place qu’il occupe sur une table. Ça déborde littéralement de partout. J’ai vraiment l’impression d’un jeu de base, avec son plateau central, et des modules ajoutés au fur et à mesure du développement.

Et dire que 5 ou 6 extensions sont déjà disponibles… Le syndrome du jeu pensé pour avoir du succès sur Kickstarter : quelques figurines, beaucoup de matos, plein d’extensions.

Ergonomiquement, c’est assez désastreux. Mention spéciale au petit plateau à construire pour la zone quadrillée où l’on pose ses jetons pour débloquer la ressource recouverte, et ensuite revenir poser un cube au-dessus de 4 autres et gagner des PV. Lui, on ne sait pas ce qu’il fait là, il arrive comme un cheveu sur la soupe, n’a même pas l’air de faire parte du jeu, et reste dans son coin. Illustration parfaite de mon propos en comparant ce jeu à un oignon, j’ai une impression d’ajouts de mécaniques de manière artificielle.

Sans volonté de me moquer, j’imagine l’auteur en pleine recherche sur son jeu, et qui se rend sur BGG en prenant la liste des jeux qui ont le plus de succès :

« Ok, le deckbuilding marche toujours aussi bien, les gens aiment avoir de belles cartes en main, on va en mettre. Le placement d’ouvriers est un indispensable dans les euro-games, alors on fonce. La piste de points de victoire autour de la table c’est bien mais un peu dépassé. On va rajouter un plateau avec une piste de réputation avec une prime au joueur le plus haut. J’aime bien cette idée de déclin, on va ajouter ça au cycle de vie des cartes et de gestion de la main du joueur. Et un petit plateau modulable en plus, ça fera pas de mal, on va quadriller tout ça, et y poser des jetons. Ok, pas mal, maintenant on va essayer de faire fonctionner tout ça ensemble. »

Je ne parlerai donc pas des extensions, j’ai vu que certaines rajoutaient des plateaux en plus … no comment, je n’ai même pas envie de les essayer.

l

Un jeu très correct

Malgré tout ça, vous pourriez vous dire que je n’ai pas aimé ce jeu, encore une fois ^^

Eh bien même pas. Endless Winter n’est pas un mauvais jeu, loin de là. Est-il mémorable et mérite-t-il sa place dans ma ludothèque ? Non, mais pas (que) à cause de défauts qu’il aurait, mais plutôt à cause d’un manque (Oui la boite déborde, vous me direz qu’il ne manque rien à ce jeu, il pourrait même en redonner à d’autres.).

Oui mais ce jeu manque d’évidence. Manque d’effet waouh, et manque de personnalité. Les parties sont agréables, le matos est très chouette, chaque joueur peut essayer différentes stratégies, et n’est pas réduit à 1 seule action possible. Mais ça n’en fait pas un excellent jeu selon moi, et ce côté addition de mécaniques me fait le même effet qu’avec Narak que j’ai revendu. C’est bien, c’est beau ça tourne, mais ça ronronne, et ça ne me donne pas envie d’en faire 10 parties. C’est typiquement le jeu qui fait dire aux joueurs après la partie « Ouais c’est sympa, et puis c’est joli en plus ! »… Généralement ce qu’on dit quand on ne sait pas trop quoi dire d’autre justement.

Mais, forcément, quand on utilise des mécaniques bien rodées et qui ont fait leurs preuves, on fait rarement un très mauvais jeu. Et là on retrouve un peu de tout ce qu’on adore dans nos eurogames, mais par petites doses. J’ai apprécié le cycle des 4 tours du jeu, avec une phase de déclin à la fin de chacun d’eux. Il y a vraiment possibilité de scorer pas mal de points avec cela en plus, et thématiquement c’est plutôt bien amené. On accompagne les membres de la tribu au cimetière, d’autres prennent la place et continuent à œuvrer pour le collectif.

l

Découper les jeux

Kickstarter oblige, Endless Winter a été proposé avec plusieurs extensions. Comme d’habitude, on ajoute du contenu afin de faire paraitre la mariée plus belle qu’elle n’est, et s’assurer un financement conséquent sur la plateforme de financement participatif. Matagot va distribuer 3 extensions pour le jeu, Ancêtres, Peintures Rupestres et Rivières et Radeaux.

Je n’ai aucune idée de ce qu’elles apportent, et je n’irai pas me renseigner. Le jeu de base me paraît tellement disproportionné en termes de contenus, de place prise sur la table, et de mécaniques de jeux différentes, que je ne vois absolument pas à quel moment on doit encore lui ajouter quelque chose. On est vraiment dans la surconsommation et ce projet illustre les dérives de Kickstarter, et de plusieurs éditeurs qui suivent cette voie.

Auparavant, une extension était commercialisée si un jeu avait du succès, s’il y avait de la demande, si l’auteur avait des idées intéressantes, et plein d’autres raisons plus ou moins bonnes. Mais surtout, le questionnement respectait un sens logique, à savoir la boite de base, jouée et poncée par le public, puis une extension pour répondre à une demande.

Dorénavant, on observe tout à fait l’inverse. Endless Winter illustre totalement ce changement dans la réflexion éditoriale, Kickstarter ayant sa part de responsabilité. J’en viens à fuir les extensions… Et pourtant, Dune : Imperium est grandement amélioré avec sa 1ère extension.

l

En résumé, Endless Winter n’est pas un mauvais jeu, mais c’est un jeu que je n’intègrerai pas à ma ludothèque et que je ne conseillerai pas. On est à l’inverse d’un jeu épuré et ce gloubi-boulga de mécaniques et de plateaux me donne un sentiment de trop plein.

l

Disponible ici :

Prix constaté : 60 €

Test : Encyclopedia

Test : Encyclopedia

Le dernier jeu livré de chez Holy Grail Games, éditeur nancéen, appelle au voyage. Un point positif que je retiens avec eux, c’est les thèmes souvent différents et tranchés qu’ils proposent. Récemment j’ai pu jouer à leur dernier projet, Copan, et le déclin d’une cité aztèque. Dominations nous mettait aux prises avec un thème de civilisation de tribus primitives. Rallyman Gt et Dirt, bah vous avez compris le thème normalement. Museum est celui qui se rapproche le plus de Encyclopedia, avec cette patine historique, ce côté découvertes artistiques et/ou culturelles, et ce rôle de chercheur/explorateur.

J’aime quand un thème n’est pas seulement plaqué mais partie intégrante du jeu et de la proposition. Copan m’avait particulièrement séduit en ce sens.

Concernant Encyclopedia, le côté mécanique du jeu va prendre le dessus plus ou moins vite selon les joueurs, mais la qualité du matériel et des illustrations va tout de même nous maintenir dans ce thème de la création de cette encyclopédie de l’histoire naturelle.

l

Mécanique naturelle

Ce ne sera pas faire injure au jeu de souligner l’importance des mécaniques qui vont vous driver tout au long des parties. D’ailleurs il suffit de dérouler les actions disponibles sur le plateau de jeu lors de l’explication de règles pour bien comprendre la suite logique, et ce que vous devrez faire. Vous allez préparer votre exploration en recrutant des experts et récolter des fonds, sélectionner des spécimens à étudier, partir à leur rencontre, et enfin publier vos travaux. Tout cela est bien indiqué sur le plateau où vous placerez vos dés d’actions, dans une logique presque sans faille et assez routinière. Non pas comme un fleuve tranquille non plus, puisque vos adversaires pourront un peu vous gêner, mais voici votre chemin vers la victoire. Optimisez cette route tracée et vous serez consacré.

Le thème est chouette, les illustrations vraiment soignées et le matériel de très bonne qualité (en même temps j’ai la version deluxe donc heureusement ^^). On comprend bien la suite logique des actions, de la préparation à votre expédition et la publication. Par contre, j’ai trouvé que ce thème passait assez vite quand même au second plan et les mécaniques passent au premier. Valeur du dé, couleur, types des cartes, ressources, optimisation. Je n’ai pas trouvé cela dérangeant, car c’est le cas la majeure partie du temps dans des jeux similaires. Ne vous attendez juste pas à être transportés d’un continent à l’autre à observer la faune dans son habitat naturel, et tout ira bien.

Ensuite, le « reproche » que je ferai à Encyclopedia est que ça manque un peu de rebondissements et ça ronronne quand même par moments. Il n’est pas le jeu le plus trépidant du monde, mais là n’est pas son propos. Soyez-en juste conscients pour ne pas être déçus.

l

Surmonter la confusion de l’action la plus importante du jeu

L’un des plus gros écueils que j’ai pu lire ou observer concernant Encyclopédia, est le fait de comprendre le fonctionnement de cette dernière action indispensable dans ce jeu, à savoir la publication de vos écrits. Les actions précédentes sont plutôt simples et logiques, mais cette phase de publication a ce je-ne-sais-quoi de déroutant qui peut vous faire perdre le fil. La règle n’est pas pour autant mal rédigée, mais rien ne remplacera la pratique pour cette action. Certains ne passeront pas le cap et ne retiendront que cette incongruité. Cela peut demander un peu d’effort, mais une fois intégrée, ça fonctionne. Cela peut juste paraitre contre intuitif.

Cela a aussi pour effet de rallonger artificiellement les premières parties, et le jeu peut vite être catalogué au rang de « tout ça pour ça ». Cela va très clairement en s’améliorant, mais il faudra y passer 1 ou 2 parties complètes pour l’ensemble des joueurs. Et comme bien souvent, le nombre de parties sur un jeu se limite à 1 ou 2, certains n’auront pas la patience d’y revenir pour faire passer la durée de jeu sous l’heure, qui est le bon format pour ce jeu. Suivant les joueurs, leur expérience, leur envie, leur assiduité, la 1ère partie peut leur paraitre assez pénible avec cette phase de publication, et peut gâcher l’expérience de jeu. Si vous la comprenez du 1er coup, ou si à la 2ème partie ça roule pour vous, alors la voie est dégagée et Encyclopédia devrait vous convaincre et vous faire revenir à sa table.

l

Optimisation et frustration

Encyclopédia va vous endormir un peu avec un rythme assez tranquille, des actions qui se déroulent assez sereinement (préparation, récupération de cartes animaux, expédition et publication) la plupart du temps dans le même ordre. Par contre ne croyez pas que la partie sera un fleuve tranquille. La faute a cette **** d’action de publication qui vous fera rager régulièrement.

Pour l’optimiser, il faudra que les astres soient alignés. Comprendre que vous devrez mettre la main sur les animaux qui combinent entre eux (au mois 2 types en commun). Le problème c’est que dans ce jeu de société … bah il y a société et vous ne serez pas seuls. Du coup vous allez maudire vos adversaires qui vous raflent sous le nez ce reptile qui aurait combotté comme pas 2 avec ses autres potes à sang froid que vous gardiez bien au chaud.

Bon, vous irez quand même publier, mais ça n’aura pas la même saveur car ça sera forcé, et sacrément pas optimisé. Vous y repenserez souvent à ce combo de fou qui vous tendait les bras. Et oui, pour viser les + de 300 points à ce jeu, il faudra y jouer, y rejouer, et croiser les doigts et tout ce qui traine aussi 😉

Quel calvaire quand on va publier, et que l’on défausse des cubes chèrement acquis précédemment et qui ne rapportent pas un point … ^^

l

La hype de la nature

Encyclopédia est un format de jeu pour « initiés » telle que cette catégorie semble être nommée depuis quelques temps déjà. Un peu complexe et long pour être joué en famille avec des non-joueurs, et un peu trop léger pour ceux habitués à se triturer le cerveau pendant des heures. Avec la faune et sa découverte pour thème, il pourra faire penser à Wingspan, le fameux jeu mettant en scène les différentes espèces d’oiseaux du monde. Encyclopédia a été le plus gros succès sur Kickstarter pour Holy Grail Games avec plus de 5.000 backers. On verra comment se déroule sa vie en boutiques, et s’il peut obtenir une petite partie du succès mondial de Wingspan.

Avec d’autres jeux comme Cascadia, Living Forest, Meadows, et bien d’autres, le thème nature, contemplatif, et reposant remporte clairement du succès depuis quelques temps. Les vikings, zombies et autres thématiques qui cartonnaient il y a quelques années semblent avoir pris un peu de recul, et c’est pas plus mal de voir un renouvellement. Quel sera le prochain thème qui aura la cote ??

D’ailleurs, l’auteur Bruno Faidutti a mis en ligne un article intéressant sur le sujet que vous pouvez lire ici.

l

Disponible ici :

Prix constaté : 54,20 €

Test : Eleven

Test : Eleven

L’avis de Fabien :

l

Un jeu de gestion dans l’univers du football, et dont la proposition ludique se rapproche d’un football manager (jeu de gestion de football qui connait un succès mondial depuis de nombreuses années) en jeu de société, moi ça me branche. Alors par contre je suis circonspect dès l’annonce de projet, ça me parait tellement difficile à retranscrire sur un jeu de plateau, que je demande à voir.

l

Une sorte de Football Manager sur nos tables

Les exemples d’adaptation de jeux vidéo en jeux de société sont nombreux, mais ça n’est pas toujours simple. Ça n’est pas parce que le jeu vidéo est bon, que le jeu de société adapté le sera. Ces derniers temps, on pourra citer Wolfenstein, Anno 1800, Slay the Spire (à venir), This War of Mine, Rainbow 6, Assassin’s Creed, The Binding of Isaac, Dark Souls, etc.

Si, en plus, on ajoute la difficulté d’adapter le football en jeu de société, on pourrait se dire que Portal Games cherche les ennuis. Pour ne pas non plus démarrer de zéro et aller au casse-pipe, l’éditeur va « reprendre » un jeu existant, pas vraiment diffusé en France, et qui a un succès d’estime auprès de ceux qui ont pu y jouer : Club Stories par Thomas Jansen. 8,2 de note BG, mais 93 personnes seulement le possédant sur cette même plateforme. Donc pas vraiment révélateur.

Mais suffisant pour attirer l’attention de Ignacy Trzewiczek, pas vraiment le premier venu puisqu’on lui doit notamment 51st State, Robinson Crusoé, Detective, Imperial Settlers et First Martians. Donc la collaboration des 2 a abouti à une campagne KS avec tous les standards habituels, stretch goals et multiples extensions en prime. Iello s’est occupé de la VF, et le voilà dispo dans nos contrées.

Oui, il faudra prévoir une grande table …

l

Tellement d’imprécisions dans la règle que ça en gâche le plaisir.

Les règles et la traduction sont clairement des éléments que je considère comme devant être parfaitement bordés avant la sortie d’un jeu. Il n’y a rien de pire que de jouer à un jeu et voir son expérience gâchée par une mauvaise rédaction de règles, un point de règle mal compris par les joueurs, ou encore une erreur de traduction. C’est un vaste sujet qui concerne beaucoup d’éditeurs, et cela est malheureusement souvent lié à une attribution de ressources insuffisante à la case relecture et traduction. Un poste de dépenses souvent sous-considéré, mais pourtant tellement indispensable pour nous les joueurs. Heureusement certains font le travail, et Eleven fait l’objet d’une traduction par Iello qui semble réussie. Par contre, dans le cas qui nous intéresse aujourd’hui, c’est à la base de la rédaction des règles que le bât blesse.

Eleven est censé être un jeu vous mettant à la tête d’une équipe de foot, et surtout d’un club de foot. Vous devrez gérer les finances, le recrutement, le personnel, les infrastructures du stade, et les matchs. Un jeu de gestion dans l’univers du foot donc. Le problème, dans ce genre de jeu, est que si les règles souffrent d’imprécisions chroniques, et laissent la part libre à l’interprétation des joueurs, le côté gestion en prend un coup. Difficile de gérer quoi que ce soit, si vous n’êtes pas sûr de ce que vous devez faire dans tel ou tel cas. Une fois ou 2 dans une règle, on passe l’éponge, mais là c’est d’un autre niveau. J’ai rarement autant regardé de vidéos (Au passage, les vidéos faites après 1 partie pour dire que le jeu est top, ça vaut pas grand-chose dans le cas présent… Puisque clairement plus on y joue, plus on se rend compte de soucis dans la règle.), ou consulté BGG pour un jeu. Tellement de questions après ma première partie, et les suivantes, que sans ces supports (surtout BGG vous avez compris), je ne vois pas comment j’aurais pu aller au bout.

Le système de points à attribuer aux autres équipes de votre championnat qui est illogique, la gestion des jetons joueurs que vous pouvez retourner sur telle ou telle face (buteur ou défenseur), la résolution d’un match, et les arrêts possibles par le gardien, les cartes tactiques, … et j’en passe. D’ailleurs, sur les rézos, quand un joueur poste une photo de sa partie, il n’est pas rare que les commentaires lui indiquent une erreur de score, de placement ou autre.

Bref, c’est à tel point qu’un FAQ est dispo (en anglais) sur BGG, qu’elle est soumise actuellement à validation par l’auteur et l’éditeur, et qu’un projet de re-rédaction de règles par les fans semble être lancé.

l

Ceci est un jeu solo.

Encore une fois, sans connaître BGG et récupérer les règles de PvP (comprendre Player vs. Player), ou acheter une extension qui propose ces règles, vous serez ravis de vous attabler à 3 ou 4 autour de 2 tables de jeu (oui vu la place qu’il prend), gérer votre club, recruter vos joueurs, signer avec des sponsors, entrainer vos joueurs … pour finalement ne jouer que contre des équipes gérées par le jeu. Oui, il n’est pas prévu d‘affronter les équipes des autres joueurs humains durant vos parties.

Si l’on ajoute le fait que l’interaction est réduite à peau de chagrin concernant les éléments de jeu, on est clairement sur un jeu solo, qui n’a en soi et avec la boite de base, aucun intérêt à être joué à plusieurs joueurs humains sur la même partie. Mais bon vous comprenez, indiquer 1 joueur sur la boite, ça vous prive d’une sacrée partie des potentielles ventes.

l

Pas mauvais pour autant

Eh bien oui, de manière étonnante, le jeu n’est pas mauvais, loin de là, et pour qui aura suffisamment de courage pour parcourir les forums et trouver réponses à ses questions (C’est souvent les mêmes qui reviennent d’ailleurs, preuve que pas grand monde n’a compris ces points de règles.). Il faut passer le cap de ces premières parties délicates, et prendre le temps de faire quelques recherches.

Après vous pouvez réduire de manière conséquente la durée de vos parties, et il m’est arrivé à plusieurs reprises de faire une saison tout en regardant d’un œil un match à la télé. Bon bien sûr, si vous regardez jouer Naples, Manchester City ou quelques autres équipes, vous serez logiquement souvent en train de regarder le vrai match.

Mais en maitrisant les différentes étapes, vous pourrez gérer votre club, votre personnel et votre équipe avec les 4 actions possibles au minimum en semaine, puis enchainer les matchs (dont la résolution du score n’est pas évidente à prendre en main au début) sera bien plus fluide et rapide après quelques parties.

A vous d’enchainer les saisons, les 6 scenarios de la boite de base, et prendre l’extension campagne solo si le cœur vous en dit.

l

l

L’avis de Romain B. :

l

Critique rédigée à l’aide d’un jeu fourni par l’éditeur.

l

Un jeu vidéo sur table ?

Eleven, le football manager sur plateau ? Cette affirmation est tout à fait impossible.

Football Manager dispose de tellement de paramètres que c’est physiquement impossible de le proposer en jeu de plateau et, une fois ce point éclairci, on peut se demander si Eleven nous propose plutôt une bonne simulation de gestion de club.

Non mais pas loin 

Force est de constater que le jeu coche bon nombre de cases, on gère le stade, les encadrants autour de l’équipe (jusqu’aux stadiers), les choix tactiques et bien entendu les joueurs. Le revers de la médaille est aussi dans le thème.

Au final, vous aurez la tête dans votre club et c’est bien normal avec tout ce qu’il faut y faire et vous ne regarderez donc pas ce que font vos adversaires.

Et là, c’est pas bon

C’est le principal reproche que je ferai au jeu : il n’y a pas un gramme d’interaction. On joue 2 heures dans son coin, on se fiche totalement de ce que vont jouer les autres. Eleven est un jeu solo avec des potes à côté.

Continuons avec le côté déplaisant. Il y a trop de matériel, trop de pions, de cartes, de textes et ça dessert énormément le jeu. Ça provoque aussi des effets de bord comme des doutes sur les règles, des retours fréquents dans le livret de règles qui ne répond pas à toutes les interrogations. Une FAQ est disponible et le forum sur BGG (en anglais) est bien fourni, mais ça reste désagréable de sortir son téléphone pour vérifier certains points.

Je reviens sur la pléthore de matériel. C’est bien, on a des jetons pour permettre d’avoir plein d’effets, de situations. Mais, encore une fois, on se retrouve avec le besoin d’avoir une table immense pour jouer convenablement. 

C’est une habitude chez Portal Games de proposer beaucoup (trop) de matériel. Avec Eleven, ça m’a sauté aux yeux et en me rappelant les Robinson Crusoé, First Martians ou Prêt à Porter, je me suis dis que cette profusion de matériel dont une partie n’est pas ou peu utilisée à chaque partie, c’est quand-même désagréable. Un dernier point sur les jetons cylindriques pour les ressources… on est en 2023 les gars, ne me dites pas que vous ne pouvez pas trouver mieux, ça me sort du jeu de dépenser 3 bleus et 4 rouges… les ressources deviennent abstraites, c’est une grosse erreur d’édition.

l

Les « extensions »

C’est ce que je lis à chaque retour que je vois sur le jeu, les extensions apportent telle ou telle amélioration, gameplay supplémentaire et autres.

J’ai le sentiment depuis le début qu’Eleven est un jeu complet que l’on a découpé pour en extraire des extensions. On a donc un jeu amputé d’une partie de son gameplay et quand il y a un manque, ça marche moins bien.

1 boite de base et 5 extensions au lancement. Pas mal

l

Il n’y a pas que du mauvais.

Bon, avec tout ça le jeu est rhabillé pour l’hiver, mais il a aussi de belles qualités.

Reprenons avec le matériel, les plateaux joueurs avec leur revêtement qui maintient les éléments en place c’est bien malin ! Il y a du matériel mais ça ne bouge pas.

Les illustrations sont réussies, ça colle au thème et d’ailleurs en point fort, ce thème, si vous êtes un peu intéressé par le foot, ça marche ! On rêverait à des vraies équipes mais bien évidemment le budget aurait explosé et il est impossible d’en tenir rigueur à l’éditeur. Au final le principal c’est qu’on y est aux rênes du club, c’est nous les patrons !

Le plaisir de jeu est là, on se prend à vouloir réussir, gagner le match du weekend, recruter le nouveau Kylian et l’entrainer pour devenir un champion.

Le jeu propose tout cela, gérer les fans, le personnel, l’évolution du stade, les décisions du board et surtout la gestion de l’équipe, les transferts et la tactique. Chaque paramètre est complet si l’on garde en tête qu’on est en présence d’un jeu qui se joue en 6 semaines.

Eleven est un jeu pour tous ceux que le foot interpelle. Le jeu ne sera pas le meilleur de l’année mais ça ne l’empêche pas d’être agréable à jouer. Les parties sont un peu longues et à 3 ou 4 joueurs ça me parait trop long.

Au final, Eleven est un jeu solo mais pas pour joueur solo. Il a des arguments pour amener des joueurs qui ne jouent pas seul habituellement à le sortir pour une petite partie et ça c’est une sacrée performance.

l

Disponible ici :

Prix constaté : 45 €

l

Et pour ceux qui veulent une vidéo règle, on vous redirige vers Jeux en Carton qui fait du très beau boulot :

Test : Discordia

Test : Discordia

L’empire romain s’étend et de nouvelles cités se développent le long du Rhin mais les barbares ne sont jamais loin.

Discordia vous demande de développer votre ville sur 4 aspects : militaire, commercial, pêche et agriculture. Le tout en surveillant les raids de germains.

Discordia est le nouveau jeu de Bernd Eisenstein à qui l’on doit beaucoup : Carthago, Pandoria ou Zack and Pack parmi de nombreux autres jeux. Aux illustrations Lukas Siegmon que l’on a croisé sur Hallertau ou Reykholt. Discordia est prévu pour 2 à 4 joueurs et la bonne nouvelle c’est que Sylex vient d’annoncer la version française prochainement !

l

Alors pose ton pilum, légionnaire, et regardons ce que propose le jeu.

Dans Discordia, tout tient en 3 dés, oui 3 petits dés, un rouge un bleu et un jaune. Avec ça, c’est tout un monde qui s’offre à vous si vous réussissez à vous adapter aux lancés et à ce que vous laisse Maximus.

Le matériel pour commencer et la boite dénote par son épaisseur très contenue ! La couverture est magnifique, un très beau travail et autant vous le dire à l’intérieur c’est bien plus basique, tout est orienté pour une lisibilité des icônes et ça fonctionne.

Les plateaux joueurs sont assez particuliers, faits d’une feuille à la Terraforming Mars ou Underwater Cities avec un plateau en carton à coller par-dessus. Le résultat c’est un plateau double couche auquel on est pas habitué, c’est déstabilisant à l’ouverture de la boite et lors de la première partie mais on s’y habitue.

La boite n’est pas bien épaisse, ce qui me plait avec toutes les super méga deluxe all in box que l’on voit passer en ce moment. De plus, elle est bien pleine avec tellement de tuiles… de quoi assurer une rejouabilité tranquille. On ajoutera des meeples au nombre de 160 !

Et 3 dés, juste 3, et avec 3 dés on va créer toute une cité en bord de fleuve sous la menace germaine.

Discordia propose un gameplay plutôt simple, mais avant de parler gameplay, parlons fin de partie !

Pour l’emporter il vous faut mettre tout le monde au travail ! Dès qu’un joueur n’a plus de meeple en réserve il gagne la partie instantanément.

La partie peut également se finir en 4 manches et là ce sera le joueur avec le moins de meeples restants qui l’emportera. C’est malin, à contre courant de nombreux jeux, bref, c’est rafraîchissant !

Un petit mot sur le livret de règle qui aura perturbé ma lecture des règles par son format à la wargame, avec un chapitrage précis et des renvois d’un chapitre à un autre tout au long de la lecture des règles. Au final, on s’en sort très bien, mais j’ai eu quelques soucis pour retrouver certains points de règles en cours de partie.

l

Maintenant retour au front et voici comment jouer :

Le plateau central propose 6 espaces d’action, un par face de dé, et pour chacun plusieurs actions possibles. Vous n’en ferez qu’une, donc choisissez bien.

Vous allez pouvoir placer des meeples de votre réserve sur un espace d’action, récupérer des étoiles qui vous serviront à valider des étages technologiques ou récupérer une tuile. Vous pourrez également poser des fondations vous permettant d’accueillir de nouveaux bâtiments.

Les tuiles sont des bâtiments militaires, marchands, des fermes ou des bateaux. Elles permettent de venir placer des meeples pour les « consommer » et ainsi vider sa réserve. C’est pour cela que certaines tuiles ne vous apportent aucun effet une fois pleines.

Cependant, les tuiles rouges militaires vous seront utiles pour combattre les germains qui vont tenter de vous attaquer à chaque fin de manche.

Les tuiles proposent également une ou deux faces de dé. Si le dé que vous activez est celui représenté sur vos bâtiments, ceux-ci s’activent et accueillent des meeples automatiquement.

Il vous faudra donc récupérer des tuiles pour obtenir des bonus, quel que soit le dé choisi par la suite.

Un autre aspect important repose sur les deux pistes de technologie et du canal sur lesquelles vous allez placer vos étoiles pour débloquer des bonus de plus en plus intéressants.

La piste technologique est un élément central, peut-être un poil trop, et il vous faudra la jouer obligatoirement pour espérer l’emporter. Toute la question est de définir le timing avec lequel vous allez progresser sur cette piste, et, là encore, quelques choix seront au programme.

Et pour tout cela seulement 3 dés. Et encore ! Le premier joueur, alias le Maximus, lance ces dés et s’en réserve un, les autres devant se contenter d’activer l’un des deux restants. C’est d’ailleurs l’une des seules interactions que l’on peut qualifier de directe.

Quelques objectifs et bonus sont également présents, histoire de créer la course entre les joueurs et ils sont plutôt alléchants, donc ça va fritter un peu pour les obtenir en premier.

l

l

Bon, et au final ça dit quoi ?

Sort de tout ceci un jeu facile à jouer avec des choix intéressants. Pour la difficulté, on se situe dans de l’initié, pas de grosse difficulté, pas de long terme avec des strates d’objectifs en cours de chemin à calculer, mais tout de même des choix et de l’anticipation.

Les manches sont rapides, chaque joueur ne faisant qu’une action avec divers bonus à activer, le down Time (le temps d’attente) est court et la partie reste vivante.

Ce qui m’a le plus marqué reste que tout ceci se tient en 3 dés. Avec si peu, on passe entre 45 minutes à 2 et 1h30 à 4 sans voir le temps passer.

Petite aparté pour les allergiques du hasard. Vous ne pourrez pas adapter les résultats des dés obtenus ou extrêmement peu. Pour autant, Discordia n’est pas un jeu de hasard et vos choix seront importants, vous allez adapter vos possibilités et vos activations pour que, peu importe le résultat des dés, vous ayez toujours des actions et des bonus intéressants.

Avec son système de scoring hyper simple pouvant même déclencher la fin de partie, Discordia va vous faire réfléchir à l’inverse des autres jeux en cherchant à ne plus avoir d’ouvrier disponible, et donc adapter ceux qu’il vous reste aux tuiles actives que vous possédez.

Discordia est un jeu bien agréable à la sortie d’un Essen plutôt morne. Le fameux jeu simple mais pas simpliste qui conviendra pour jouer avec des joueurs initiés. De par son gameplay et ses conditions de victoire, il se démarquera de nombre d’autres jeux.

Alors, à vous de lancer les dés et de construire la meilleure ville au bord du Rhin pour Rome !