Cette critique a été rédigée à l’aide d’une boite fournie par l’éditeur que nous remercions.
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Marrakesh est un vieux. Dans ce monde du jeu de société où toute nouveauté disparaît au bout d’un mois, le diamant d’or 2023, élu en janvier dernier, est déjà un ancien.
Le jeu de Stefan Feld (Bonfire, les châteaux de Bourgogne) illustré par Patricia Limberger et Franz Vohwinkel est édité chez Queen Games qui l’a financé par un Kickstarter proposant versions deluxe et classique. Le succès du jeu, mais son prix plutôt prohibitif (on y reviendra) ont poussé l’idée de sortir une version essentielle proposant le jeu dans une version réduite en termes de matériel uniquement. C’est à ce moment qu’intervient Atalia pour nous proposer la version française du jeu.
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Aller à l’essentiel
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Le matériel de cette version essentielle, nous propose-t-il une expérience de jeu réduite ?
La boite passe d’un format rectangulaire plutôt imposant à une boite carrée de taille normale pour un jeu expert. Personnellement ma kallax s’en porte mieux, c’est devenu depuis quelque temps une information importante au moment de l’achat, la taille de la boite. C’est ce qui m’a fait renoncer à l’achat d’une des deux versions précédentes. Cette version essentielle propose également un plateau central plus concentré regroupant les pistes mosquée et palais, les portes et la rivière tout comme les deux autres versions. En revanche, les tuiles du marché et les parchemins sont à disposer à côté de ce plateau.
Pour les plateaux joueurs, ils sont en simple couche, et pour marquer votre progression sur différentes pistes il ne vous faudra qu’un seul marqueur en bois. Ces marqueurs en bois, les keshis, sont très limités dans le matériel du jeu. Pour compenser, l’éditeur a ajouté des keshis en punchboard (carton), l’idée est de garder les éléments en bois pour les pistes que l’on peut augmenter, mais avec un keshi par joueur, et de conserver également ceux qui passent dans la tour. En revanche, quand les joueurs les récupèrent pendant le draft, ils sont remplacés par les éléments en carton.
Et on s’y fait très bien ! Je trouve cela même mieux visuellement, fini les keshis dispersés dans les différentes zones de votre plateau, désormais tout est plus concentré et bien plus lisible visuellement.
La double couche des versions supérieures est, bien entendu, plus agréable, mais ces plateaux simple couche ne diminuent pas la qualité du jeu, les joueurs n’ayant pas vu les autres versions ne sentiront pas la baisse de qualité.
Le bémol se trouve au niveau de la tour que je trouve un peu fragile, la mienne est stockée en dehors de la boite pour ne pas la démonter. Pas de sachets plastiques non plus dans la boite et pourtant, il y a du matériel à ranger. J’ai opté pour un rangement en case comme avec le silo token de gamegenic, tout est rangé correctement, mais la tour est donc hors de la boite.
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Le Diamant d’Or 2023
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Le gameplay de Marrakesh se déroule en 3 parties chacune divisée en 4 manches. Vous allez jouer vos keshis 3 par 3, ils définissent les 3 actions que vous allez jouer à cette manche parmi 9 actions possibles.
Ils sont ensuite passés à travers de cette tour qui en retiendra peut-être quelques-uns qui tomberont lors d’une prochaine manche, pour ensuite les récupérer chacun son tour.
Cette tour peut paraître gadget, mais elle apporte une légère incertitude qui change vos choix de keshis. Vous n’êtes pas assurés de les récupérer même si vous êtes le premier joueur. Étrangement, ce manque de contrôle est plaisant, il limite la réflexion et l’analysis paralysis qui va avec ; après tout, pourquoi anticiper tous les paramètres si mon keshi ne tombe pas ?
Ensuite, ces keshis améliorent les actions que vous pourrez faire à votre tour, à vous de faire les bons choix, de spécialiser les actions qui vous paraissent les mieux adaptées à votre stratégie pour scorer au mieux.
C’est d’ailleurs un reproche que l’on peut faire au jeu : les tuiles oasis qui apportent de l’asymétrie sur les objectifs de chacun sont face cachée en début de partie. Je vous propose la petite variante maison consistant à les placer face visible pour que tout le monde puisse orienter sa partie dès le début.
Marrakesh n’est pas compliqué à maîtriser, pas de règle cachée, de petit point obscur. Sa « complexité » vient des 9 actions à votre disposition. Chacune vous permet de récupérer des ressources, de monter sur des pistes communes aux joueurs, d’acheter des bonus ou encore d’activer vos tuiles de scoring.
Rien de nouveau sous le soleil marocain, du classique, mais avec 12 couleurs de keshis et 9 actions, on reconnaît la patte Feld dans cette profusion de possibilités. En revanche là où d’habitude, on trouve une salade de points plutôt indigeste, le genre de chose qui me fait fuir, ici il y a bien entendu pas mal de points de victoire à faire (on dépasse les 140) mais en cours de partie, ils ne sont pas si fréquents et surtout le scoring final est clair et rapide.
Un très bon point pour moi qui s’ajoute à la fluidité en cours de partie.
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Mais qu’est-ce qui fait de Marrakesh le vainqueur du Diamant d’Or ?
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Il n’est pas le plus expert des jeux de 2023, pas celui avec le plus gros challenge en termes d’optimisation non plus.
En fait, il est très efficace, tout ce qu’il propose, il le fait très bien avec une fluidité certaine. Il est également satisfaisant, avec cette légère frustration en fin de partie qui donne envie de rapidement y rejouer. On peut également ajouter que les parties durent environ 45 minutes par joueur, ça fait un peu long à 4, mais à 3 (meilleure config) ou à 2 le jeu tourne comme une horloge.
Pour l’âge des joueurs, on est sur 12+ même si les petits ludistes pourront l’approcher dès 10 ans.
Marrakesh est un jeu qui reste, on y revient fréquemment et le plaisir est toujours là. Ce n’est pas un gros jeu expert, il n’a pas un matériel premium (dans cette version essentielle) mais il est là, solide, et sur la table, ça en jette.
Pour tout cela, Marrakesh mérite a minima de le tester et avec cette version essentielle presque abordable financièrement, il est temps de s’intéresser à ce jeu.
Super week-end passé aux Jeux du Stan à Nancy où nous avons pu découvrir quelques jeux très sympathiques, au premier range duquel Merlin, la nouvelle production de Stefan Feld et Michael Rieneck, distribué par Queen Games. Stefan Feld est un des gros auteurs allemands et qui excelle dans le bon gros jeu à l’allemande – eurogame – c’est à dire des jeux de gestion, souvent très mathématiques avec une limitation du hasard et de l’interaction. Le terme « kubenbois » est aussi utilisé car on y associe souvent du matériel assez sommaire et … des cubes en bois. Voilà pour la partie culture voyons voir ce que sa dernière création a dans le ventre!
– contenu de la boîte –
Basé sur la légende du Roi Arthur, d’Excalibur et du Graal, le jeu prend place alors que l’on cherche un digne successeur au Roi Arthur. Avec l’aide de Merlin, les chevaliers vont devoir cravacher pour prétendre au trône. Ils vont devoir augmenter leur influence dans les différentes provinces, construire leurs manoirs, éliminer les traîtres, accomplir des quêtes et gérer les emplacements de leurs serviteurs afin de gagner le plus de points de victoire possible. Le jeu est prévu pour 2 à 4 joueurs, à partir de 14 ans et pour une durée d’environ 1 à 2 heures (et oui c’est allemand!!! 😉 ).
Le matériel est beau, le plateau central très bien illustré. Il représente la table ronde au milieu, vue du haut, avec de grandes colonnes séparant les différentes provinces se situant tout autour de la table ronde. Chaque joueur dispose d’un plateau individuel, et une autre partie représentant le domaine du roi se place à proximité du plateau principal.
Au début d’un tour chacun lance 4 dés, 3 pour son chevalier et 1 pour Merlin. Il n’y a qu’un seul Merlin que tout le monde peut faire déplacer. En fonction des actions que l’on souhaite effectuer le joueur va utiliser ses dés pour déplacer son chevalier (ou Merlin mais une seule fois par tour puisqu’il n’y a qu’un seul dé Merlin par joueur) autour de la table ronde. En fonction de la case sur laquelle il s’arrête il va pouvoir effectuer l’action correspondante. En vrac il peut construire un manoir, échanger une carte objectif qui ne lui convient pas, échanger une influence qu’il a préalablement posé dans une province contre un drapeau, ou contre un bouclier, ou contre le placement d’un de ses serviteurs dans une province. Il peut aussi gagner des PV équivalents au nombre de boucliers/d’influences/cubes qu’il possède, etc… Il pourra aussi récupérer le Graal ou Excalibur qui donnent droit bien sûr à des bonus intéressants.
– centre du plateau et roue des actions –
Un des éléments qui nous a vraiment plu c’est la planification des déplacements. Au début du tour on lance donc ses 4 dés. A chaque phase de déplacement on va en choisir un pour faire avancer son chevalier (ou Merlin) du nombre de cases indiqué par le dé. Il y a plusieurs possibilités pour modifier la face du dé, ou le sens de déplacement durant la partie pour réussir à tomber sur l’action qui nous intéresse. Cela oblige à une vraie anticipation et avoir plusieurs coups d’avance. Bien trouvé!
Sur son plateau individuel on dispose de 4 serviteurs (les cylindres jaunes en bois) représentant un maçon qui nous permet de gagner un cube permettant de construire un manoir, le soldat qui nous permet d’obtenir un bouclier permettant de se protéger des traîtres et les éliminer, le porte-drapeau qui permet d’obtenir un … drapeau, la dame d’honneur qui permet d’augmenter son influence dans un province. Sur les côtés gauche et droit on vient positionner les drapeaux que l’on récolte lors de la mise en place du jeu, et tout au long de la partie grâce à notre porte-drapeau entre autres. Certaines quêtes vous demanderont d’avoir tel ou tel drapeau en votre possession. Si c’est le cas, et à n’importe quel moment de votre tour, vous pouvez valider la quête et empocher les PV correspondant. L’intérêt principal des drapeaux est que chacun a un « pouvoir » particulier en fonction de sa couleur. Certains permettent de déplacer son chevalier sur la roue des actions, certains de changer la face d’un de vos dés, un autre de déplacer votre chevalier dans le sens inverse des aiguilles d’une montre… Bref de quoi adapter votre stratégie et vos déplacements en fonction de vos besoins et de vos adversaires.
– le plateau individuel –
Sur la partie haute du plateau on voit les 6 blasons représentant les 6 provinces. Au début du jeu, et après chaque phase de décompte des points (il y en a 3 dans la partie), on nous attribue des traîtres qu’il s’agira de réduire au silence puisqu’ils nous sanctionneront de 3 PV de pénalité s’ils sont toujours actifs à la phase de décompte.
– les traîtres –
Pour s’en débarrasser il faut récupérer un bouclier de la couleur correspondante. Sur l’exemple ci-dessus j’avais réussi à en récupérer 1 pour chacun de mes traîtres, et donc éviter de perdre 3 PV par traître vivant.
– les cartes objectifs –
Au début du jeu on nous attribue 3 cartes objectifs qu’il faudra essayer de remplir pour accumuler les PV. Il s’agit de récupérer les éléments demandés en haut à gauche de la carte. Par exemple, pour le premier objectif à gauche, il faut avoir en sa possession 1 influence dans la province noire, 1 cube provenant de la province marron, et un bouclier de la province mauve.
Près du plateau principal, on construit aléatoirement au début du jeu le domaine représenté par des tuiles de différentes couleurs. C’est sur cette zone que l’on viendra construire nos manoirs qui nous rapporteront des PV suivant la tuile et la zone sur lesquelles ils sont bâtis.
VERDICT
Nous avons intitulé cet article Aperçu plutôt que Test comme habituellement car nous n’avons pu l’essayer qu’une seule fois et ne pouvons juger de la rejouabilité du jeu, même si une partie est parfois suffisante pour s’en faire son avis ;-).
En tout cas Merlin ne nous a pas laissé indifférent! C’est un vrai jeu de gestion, de placement et de gain de PV. Il est complet, bien illustré et très plaisant. La thématique du Roi Arthur et de Merlin l’enchanteur est plaisante, même si comme souvent dans ce genre de jeu elle n’est pas prépondérante. Mais suffisamment présente pour y être agréable.
Il y a beaucoup d’aspects à gérer en même temps, et le fait d’avoir un plateau immense au centre + un plateau individuel + une zone pour le domaine + les cartes objectifs et leur défausse doit suffire à vous en convaincre. L’interactivité se limite à jeter un œil à ce que font les adversaires pour veiller à ne pas perdre l’influence d’une province (chacun est libre de placer ses marqueurs d’influence dans une province, mais lors du décompte final c’est le chevalier majoritaire qui emporte la mise), et parfois venir prendre la place d’un de ses serviteurs dans une province.
Plusieurs stratégies sont donc possibles vu le nombre d’éléments en jeu, et le fait que presque tout ce qui se trouve sur les plateaux peut rapporter des PV. Mais pour avoir un œil partout, il faut planifier ses déplacements sur la roue des actions, accomplir des quêtes et faire attention aux 3 décomptes intermédiaires pour scorer un maximum!!
Merci à Les Jeux du Stan de nous avoir donné l’occasion de l’essayer, et à Barbara de chez Queen Games pour nous avoir présenté le jeu!