« Le roi est mort, vive le roi », cette phrase est, en substance, l’esprit de toutes les occurrences de ce jeu (il en existe 3 à ce jour). En effet, le monarque à peine mort, la mission de chaque joueur va être de lui succéder… Cette version rouge nommée « alliance » fait une parfaite extension/suite du jeu éponyme, elle est jouable séparément ou en complément de la boîte bleue, version de base.
Dans ces deux versions du jeu, il s’agit donc d’user de force, de complots ou de ruses pour parvenir à ses fins. Qui a parlé d’un petit air de Game of Thrones ? Pour les cancres du fond de la classe qui se sont endormis lorsque la version de base a emporté le titre de jeu de l’année aux As d’or en 2020, il convient de rappeler les principes du jeu…
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Les joueurs reçoivent 10 cartes de rôles identiques, mais déclinées dans leur famille respective. Chaque carte incarne donc un rôle défini au sein d’une famille, toutes les familles ont un exemplaire de ce rôle. Au hasard, ils vont tous retirer définitivement 3 rôles. Se faisant, ils déséquilibrent aléatoirement leurs forces par rapport à leurs adversaires. Dans la phase dite de placement, chacun à leur tour, en commençant par le plus vieux joueur – d’aucuns diront ici « le plus sage » – les joueurs vont ensuite ajouter à la file centrale une carte de leurs choix parmi les 7 rôles qu’il lui reste dans la main, face cachée. Le second peut choisir de placer sa carte avant ou après cette première carte. Une fois que tous les joueurs ont posé une de leurs cartes, vient la phase de résolution.
Le propriétaire de la première carte sur la piste peut choisir de la retourner, et d’effectuer l’action décrite sur la carte. Il peut aussi la laisser face cachée et y associer un jeton point d’influence. Le joueur gagne les points d’influence cumulés sur sa carte en la révélant plus tard… Mais il faut bien s’assurer de le faire avant qu’un de ses adversaires ne la détruise. S’il n’y parvient pas à temps, il verra sa carte défaussée, ainsi que tous les points associés ! Le joueur responsable se verra en plus récompensé d’un point !
Les 5 tours suivants seront des alternances de phases de placement et de phases de révélation. De fait, chaque joueur aura une carte en main à la fin du jeu, le choix sera parfois cornélien… On notera que les joueurs peuvent choisir de protéger une ou plusieurs de leurs cartes (et donc potentiellement les points d’influence associés) en la recouvrant d’une carte de la même famille. Il est donc conseillé d’avoir une bonne mémoire lors des entassements !
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La version alliance introduit 10 effets innovants offrant des options tactiques subtiles et de nouvelles décisions politiques. La version rouge porte bien son nom, puisque les joueurs vont davantage orienter leurs stratégies autour d’un équilibre entre agression et négociation !
Parmi les rôles plus marquants, les joueurs découvriront l’Impératrice qui, dans sa grandeur, récompensera le joueur de deux points, mais octroiera aussi une faveur à un rival. Le Diplomate invitera tous les adversaires à coopérer à plusieurs. L’Insurrection élimine les deux cartes adjacentes à condition de défausser un point accumulé dessus !
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Les amateurs de stratégie sur le long terme apprécieront la rejouabilité et les multiples possibilités de combo que cette extension offre. Le ressenti de mes collègues testeurs dominicaux sur ce second opus est d’ailleurs en moyenne meilleur que la boîte bleue. Les plus impatients noteront que ce jeu peut être fini relativement rapidement (20 minutes annoncées). Les plus compétiteurs, eux, salueront la richesse qu’une revanche ou une belle peuvent apporter. Les esthètes se régaleront des illustrations léchées et dans la continuité du premier épisode. Les plus observateurs trouveront original le système de boîte en tiroir. Finies les difficultés à ouvrir certaines autres boîtes en l’absence d’appel d’air… Un détail, mais il semblerait que le diable s’y cache…
Côté points négatifs, les tatillons relèvent des différences de terminologies dans les cartes récapitulatives, (celles qui rappellent aux joueurs les différent rôles) et le dépliant de la règle (pour l’explication des cartes Infiltration et Négoce). Mais en dehors de ce problème qui n’est pas non plus une montagne, (le bon sens indique la bonne direction à suivre) ce jeu est plaisant à sortir entre deux parties… En somme, un bijou de simplicité et d’efficacité !
Après avoir écrit uniquement sur des jeux allant du passable au franchement bof, j’avais envie de me faire plaisir. Heureusement pour moi, c’est pile le moment que Studio H a choisi pour rééditer la Chasse aux Gigamons. Déjà sorti en 2015 chez Elemons Games, le jeu avait obtenu l’As d’Or catégorie enfant. Du coup, j’ai pris mes sous avec moi et je suis parti me procurer cette petite merveille.
La Chasse aux Gigamons est un jeu de mémoire pour 2 à 4 joueurs créé par Johann Rousse et Karim Aouidad, illustré par Marie-Anne Bonneterre et édité par Studio H.
Pas besoin de faire original pour faire un bon jeu pour enfants et ça, la Chasse aux Gigamons l’a bien compris. Le jeu reprend le principe tout bête mais efficace du memory en y ajoutant deux petites mécaniques.
A notre tour, nous avons deux tuiles à retourner parmi neuf. Si elles sont identiques, on les récupère et on active un des cinq pouvoirs spéciaux. Une fois accumulé trois mêmes tuiles, vous les échangez contre un de ces fameux Gigamons. Trois Gigamons et c’est la victoire. Ajoutez à ça, une tuile joker et vous avez l’ensemble des mécaniques du jeu. Simple, clair, efficace.
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A quoi ça ressemble ?
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Élémons-ifique !
La Chasse aux Gigamons est d’une très grande fluidité. Les pouvoirs sont peu nombreux, leurs effets très simples et ils ont l’intelligence de s’appuyer sur un thème. Chacun étant judicieusement associé à un élément, le vent déplace les tuiles, le feu en « brûle » une, la terre bloque une tuile en y posant une pierre. Il n’y a que l’eau qui donne un pouvoir de divination mais rien qui ne pose problème. De toute façon, l’iconographie est suffisamment claire pour s’y retrouver.
L’univers du jeu a l’idée très maline de ressembler à une licence en “-mon” très populaire auprès des enfants. Il en reprend d’ailleurs le principe de chasse et de collection qui fait toujours mouche chez les enfants entre la fin de maternelle et le début de l’élémentaire. Ça tombe bien, vu que c’est précisément le public visé par le jeu.
Studio H, son nouvel éditeur, a eu la bonne idée de conserver les illustrations de Marie-Anne Bonneterre qui sont à la fois claires et superbes. Le matériel, lui, est de qualité. Ce n’est peut-être que moi mais les silhouettes des Gigamons ont l’air de mieux tenir que dans le jeu original. Mon petit regret pour chipoter, pourquoi avoir retiré les noms des Gigamons ? Ça apportait un petit plus à l’immersion…
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Attrapez-les tous !
Le tout donne un jeu fun à jouer. Chaque partie est rapide et on a toujours l’impression de faire quelque chose. Le dosage entre tactique (une pincée), mémoire (une poignée) et hasard (une bonne louche) est parfait pour ne pas effrayer les adultes souvent rebutés quand il faut retenir des trucs dans un jeu et les enfants qui, même à quatre ans, peuvent s’en sortir haut la main.
Si créer un jeu était comme faire de la cuisine, on pourrait dire que la Chasse aux Gigamons a su brillamment choisir ses ingrédients et les doser juste pour obtenir un résultat harmonieux. Une telle réussite qu’on lui pardonnera très facilement ce léger goût de déjà-vu.
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Le chaman, la chamane ou shaman, est une personne considérée par sa tribu ou son groupe comme l’intermédiaire ou l’intercesseur entre les humains et les esprits de la nature.
Il a une perception du monde que l’on qualifie aujourd’hui d’holistique dans son sens commun ou animiste (voir également les théories Gaïa). Le chaman est à la fois « sage, thérapeute, conseiller, guérisseur et voyant ». Il « est » l’initié ou le dépositaire de la culture, des croyances, des pratiques du chamanisme, et d’une forme potentielle de « secret culturel ». On le trouve principalement dans les sociétés traditionnelles où il arbore des parures spécifiques, et pratique souvent dans un certain secret.
Le terme Chaman est propre à certains peuples de Sibérie, il a été généralisé pour simplification, les natifs d’Amérique du Nord utilisent plus souvent le terme d’homme ou femme médecine.
Le chaman, homme ou femme selon les ethnies, envoie son esprit dans l’au-delà où il (ou elle) voyage.
C’est la vision ou la transe. Cet au-delà peut différer considérablement d’un peuple à un autre. Il a une géographie particulière et présente ses dangers, ses habitants et ses obstacles propres. Tout cela s’apprend. Il peut se trouver dans le ciel (Tukanos de Colombie), dans l’eau (Nootka de l’Île Victoria, au Canada), ou encore dans la roche et le monde souterrain (nombreux exemples dans les Amériques). Dans ce monde-autre, le chaman rencontrera des esprits, souvent sous forme animale, avec lesquels il dialoguera et négociera. Il recherchera une âme volée pour la rendre à son propriétaire. Il prédira l’avenir. Il luttera parfois avec d’autres chamans « mauvais ». Il s’efforcera de régler les problèmes de la vie courante, de guérir les malades, d’amener la pluie bienfaisante, de permettre et de favoriser la chasse.
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Avant que les religions judéo-chrétiennes ne commencent leur expansion en Europe, le chamanisme celte était l’un des plus puissants mouvements au monde. Les druides et chamans constituaient alors des références vers lesquelles les populations se tournaient pour trouver réponse à divers problèmes.
Ils avaient essentiellement pour mission de les aider à s’assurer un bien-être dans tous les sens du terme. Ils étaient aussi les guides au sein des sociétés, conseillant la hiérarchie dans la gestion des affaires d’État.
L’aire d’influence du chamanisme celtique était également très grande. Elle s’étendait en effet sur toute la région de l’actuelle Europe centrale et occidentale. Ce mouvement spirituel a connu son apogée durant la période allant de l’an 1000 avant Jésus-Christ à l’an 0.
L’utilisation généralisée du mot « chaman » est justifiée par le fait que la plupart des peuples où des chamans officient sont des descendants des premières cultures chamaniques du Grand-Nord Eurasien, qui se sont déplacées au cours de l’Histoire, ont traversé le Détroit de Béring et ont ensuite colonisé les Amériques, des siècles avant l’apparition de l’« Homme blanc ».
Toutes les sociétés humaines ont été, à un moment ou à un autre de leur histoire, des sociétés chamaniques. Le chamanisme n’est donc pas un phénomène local limité dans le temps : il est présent partout sur Terre et est extrêmement ancien.
Avant l’apparition de l’écriture, des religions monothéistes et de la science moderne, les chamans étaient les gardiens du savoir et du sacré. Ils personnifiaient le lien intime qui lie l’homme à la nature et s’occupaient de maintenir le subtil équilibre permettant la survie des sociétés archaïques dans leur environnement.
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Au 20ème siècle, la disparition accélérée des sociétés chamaniques traditionnelles et la nécessité de sauvegarder des pratiques en danger d’extinction a amorcé un retour de la pratique chamanique en Occident. C’est un retour aux sources, une réappropriation d’une partie de notre patrimoine culturel qui a survécu à des siècles de répression.
C’est dans ce contexte très imprégné de magie et de connexion avec la nature, qu’elle soit astrale ou spirituelle, que l’éditeur Studio H nous propose un jeu basé sur une mécanique simple : le pli de cartes, appelé Shamans.
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Shamans est un jeu sur plusieurs manches où les joueurs se retrouvent répartis entre deux camps : les Shamans et les Ombres.
La subtilité est que rien n’est figé, et au fil des manches les équipes vont changer, comme l’eau se transforme en gaz ou le mercure en liquide : la magie de la nature en somme.
Shamans est un jeu de 3 à 5 joueurs, à partir de 10 ans pour des parties d’environ 40 min, sorti tout droit de l’esprit éveillé de Cédrick Chaboussit (Lewis et Clark, les Zoeils et bientôt Lost Explorers et Lueur), illustré magiquement par Maud Chalmel (Siggil, Oliver Twist, Attrape Rêves ou bien Yozu) et édité par Studio H à qui l’on doit déjà des jeux comme Oriflamme, Hagakure ou bien J’y Crois Pas ! ).
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Connectons-nous, si vous le voulez bien, avec leurs esprits afin d’en découvrir un peu plus sur leur être de lumière et sur le jeu :
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Puisez au fond de vous afin de nous délivrer votre essence suprême : qui êtes-vous ? Et si vous étiez doté d’un vrai pouvoir shamanique, ce serait lequel ?
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Cédrick : Je crée des jeux par passion depuis 10 ans en essayant de proposer des choses que je n’ai jamais vues. L’intuition est la clé, l’étincelle qui permet de valider rapidement si les idées fonctionnent ou pas, j’adore cette phase d’exploration. Le plus dur commence juste après, les superpouvoirs s’arrêtent vite !
Maud : Mais !! J’ai déjà ce pouvoir super chamanique, voyons ! En tant qu’illustratrice, il m’arrive d’orner de mes dessins, des petits cailloux ramassés au fil de mes pérégrinations, de les accompagner d’un bout de plante, et de les unir dans un morceau de papier népalais sur lequel j’ai préalablement écrit une petite incantation de mon cru, selon le truc à soigner.
Si ça marche? Je n’en sais rien. Non. Mais ça fait toujours plaisir.
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Thibault : Thibault, petit messager (cosmique ?) de Studio H, je m’occupe de marketing et de communication. Je travaille notamment avec la presse ludique, avec nos partenaires commerciaux en France et à l’étranger, sur les réseaux sociaux et à l’événementiel. J’écris et je téléphone beaucoup dans ma tâche alors j’avoue que communiquer par télépathie me ferait gagner pas mal de temps.
Sinon, pouvoir ouvrir une petite faille temporelle pour y rédiger tranquillement de temps en temps, je prends aussi =)
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Comment est née l’idée de ce jeu ? Quelles ont été tes inspirations ? Plus largement, comment fonctionne ton esprit créatif ?
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Cédrick : L’idée de Shamans m’est venue à la toute fin 2016 après de nombreuses parties de « Time Bomb ». Il est probable qu’elle vienne aussi de plus loin (la claque « Resistance »), voire de mes nombreuses parties de belote contrée à la fac.
L’idée était de faire un jeu à rôles cachés rapide différent des autres, qui ne serait pas basé à 100% sur du bluff. L’association avec le jeu de pli est venue rapidement et s’est imposée comme une évidence. Dans Shamans, un joueur peut être tenté de couper volontairement pour des raisons tactiques ou obligé de le faire, ce qui lui demande de faire des vrais choix et éloigne du bluff pur.
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Mon esprit est en permanence dans l’analyse et la critique. Je pense que ce qui me plaît dans les jeux de société, c’est qu’on y trouve des éléments simplifiés de la vie, et c’est très inspirant. Ça m’a donné envie d’aller plus loin et d’essayer moi-même de fouiller pour comprendre pourquoi telle ou telle idée de jeu fonctionne et me plaît.
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Parlons de la thématique, qui est pour moi un élément central de ce jeu. Le jeu a-t-il toujours été thématisé autour du shamanisme ? Si des changements ont eu lieu, à partir de quels constats, de quelle(s) problématique(s) en êtes-vous arrivés à ce thème ?
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Cédrick : Bon alors, autant le dire tout de suite, jusqu’en 2020 et sa prise en main par Studio H, le jeu avait un thème très différent qui lui collait au corps et ferait baver tous les geeks. Il s’agit d’un film des années 80 avec des voitures volantes qui se passe en 2019 (non, pas celui avec un professeur ébouriffé en blouse blanche 😉 ).
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Tous les effets du jeu ont été inspirés par des éléments du film. Faire publier le jeu dans cet univers a été ma première option, par passion, et ça n’a pas été possible.
Studio H et Maud s’en sont ensuite emparés et ont fait des merveilles, au point que l’univers du jeu soit devenu un point fort, tout en élargissant la cible des joueurs potentiels !
Thibault : Hahaha, oui, lorsque Cédrick a soumis son prototype, Shamans était un jeu… Bladerunner. Les enquêteurs inspectaient les lieux et cherchaient à démasquer les Replicants qui se cachaient parmi eux. La mécanique et le thème étaient très bien intégrés, avec, par exemple, le test de Voight-Kampff qui révélait l’identité des joueurs malgré eux (aujourd’hui le Masque de Vérité). En cherchant, autour de la licence, nous avons malheureusement appris que Wizkids avait annoncé Bladerunner 2049 Nexus Protocol, justement un jeu à identités cachées dans le même univers. Mais il reste encore aujourd’hui dans le jeu un petit clin d’œil à ce premier thème, saurez-vous le retrouver ?
Nous avons réfléchi à plusieurs thématisations nouvelles, avec deux équipes, des traîtres, des lieux, des objets et leurs effets. Ce qui nous a fait pencher pour cet univers onirique est une inspiration graphique pour les cartes du jeu, où nous imaginions des paysages en style papier découpé réalisés par Maud. Tout le reste de l’univers s’est développé à partir de ça, sous nos yeux émerveillés.
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La direction artistique de SHAMANS est assez épurée, que ce soit le plateau de jeu ou bien les cartes, d’où part ce choix ? Est-ce lié au gameplay assez surprenant dans le mélange entre « jeu de plis » et « guessing instable », ou bien est-ce un choix purement thématique ?
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Thibault : Le processus de design a été assez organique et, je dois dire, extrêmement agréable ! Le point de départ était ces paysages en papier découpé pour les cartes du jeu. À partir de cela, Maud a bâti progressivement une vision complète de l’univers graphique et du design du matériel : les personnages, le dos des cartes, les pictogrammes, le plateau, la boîte… Chacune des pièces est venue s’emboîter avec les précédentes !
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Effectivement, la mécanique est inhabituelle et peut même dérouter au premier abord. Mais le jeu révèle sa profondeur et sa subtilité au fil des manches. De même, tout l’univers graphique développé avec Maud est lui aussi très original. Si tout le design était premièrement thématique, je trouve qu’il va effectivement bien avec le côté intellectuel et exigeant de la mécanique.
Derrière le jeu, il y a bien de notre part la volonté d’un « geste » ludique et artistique, avec un jeu intriguant et exceptionnel à plusieurs titres.
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Quelle a été votre apport sur l’illustration du jeu ? Vos sources d’inspiration ? Y a-t-il eu des étapes intermédiaires ou bien avez-vous de suite réussi à faire ce dont vous aviez envie ? Quelles sont les émotions principales que vous avez voulu transmettre à travers les illustrations des cartes ?
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Maud : Le brief de départ demandait un rendu papiers découpés, en rétro-éclairage pour les cartes des lieux, dans un univers que j’apprécie particulièrement. Celui du chamanisme que j’avais déjà eu le plaisir d’illustrer pour un autre super jeu (SIGGIL), mais dans un autre rendu graphique. Je me suis replongée dans mes bouquins et dans les références données par STUDIO H – les artistes Hari & Deepti – qui ont fait un travail formidable de papiers et lumières, dont les travaux ornaient provisoirement le proto.
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Tout s’est bien goupillé, la mayonnaise a pris rapidement. On a d’abord validé toutes les dernières étapes de chaque lieu, avant de décliner leurs intermédiaires à l’envers, de l’étape 8 à l’étape 1. Il fallait que chaque monde chamanique se distingue de son monde voisin, tant par sa couleur que par l’univers auquel il se rapportait. L’ensemble devait faire voyager par l’immersion.
J’espère que le jeu gardera cette vertu auprès des joueurs.
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La création d’un jeu est très souvent un travail d’équipe. Comment avez-vous articulé votre travail respectif ?
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Maud : À distance ! Tout s’est fait pendant le premier confinement. Donc une production fleuve comme je les aime. Rythmée par des feedbacks vidéo comme dans le futur que j’imaginais, petite. Fred, le chef de projet, centralisait tous les retours de l’équipe (auteurs, DA, com, etc.) et me les restituait rapidement pour que je puisse rebondir dans la continuité. Une direction artistique bien cadrée optimise tout !
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Le temps, l’énergie et la motivation. Une fois tout le jeu illustré, et un genre de pseudo déconfinement autorisé, on s’est fait une partie « pour de vrai » pour tester la lisibilité de l’ensemble, et discuter des finitions possibles à apporter au jeu pour le rendre super séduisant. *petites étoiles qui brillent dans les yeux* Mais je n’ai jamais eu l’occasion de croiser l’auteur Cédrick Chaboussit.
Ça arrive, quand les festivals sont annulés à la pelleté. Vivement !
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Thibault : Notre chef de projet Fred a présidé aux échanges avec Maud et Cédrick durant le développement du jeu. Il y avait des retours réguliers de notre part avec chaque élément qui passait sous le pinceau de Maud. Tout s’est fait vite et naturellement, avec essentiellement des petits ajustements de lisibilité ou d’ergonomie.
J’adorais cet instant de révélation au moment de découvrir un nouveau morceau de ce sublime univers graphique. De voir ce jeu prendre vie a réellement illuminé notre premier confinement ! C’était vraiment très grisant de travailler ensemble sur le projet, et nous espérons que ça se ressentira !
La rédaction des règles a aussi été un certain défi : il a fallu un peu décomposer la mécanique de plis pour bien expliquer les étapes et intégrer la thématique riche du jeu, au risque de lui donner sur le papier l’air plus compliqué qu’en réalité, où le pli se joue et résout rapidement.
D’une façon générale, le travail d’équipe était particulièrement agréable, c’était vraiment un projet extrêmement enthousiasmant, avec beaucoup de passion et de travail de tout le monde, merci et à Cédrick et à Maud, on refait ça quand vous voulez !
Cédrick : J’ai fait jouer énormément de parties du prototype entre sa création et sa présentation à Studio H, et souvent à la demande des joueurs, par plaisir.
Cela a conduit à des ajustements en continu de plus en plus fins, jusqu’à arriver à la version définitive du jeu fin 2019. J’ai ensuite vu apparaitre le magnifique travail de Maud, été consulté pour les ajustements graphiques et participé à la relecture des règles.
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Studio H est une « jeune » maison d’édition et avec Oriflamme et « Hagakure », Shamans est votre troisième jeu de cartes, est-ce une stratégie commerciale, ou bien le fruit du hasard ? Plus globalement, après avoir essuyé une vague de « roll & write » ou autre « flip & write », j’ai l’impression qu’une mode du jeu de plis est en train de renaitre, portée particulièrement par « The Crew » chez Iello. Le ressentez-vous ?
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Thibault : Honnêtement, c’est plutôt le hasard, même si je dirais que nous avons dans l’équipe une passion de l’illustration et que les cartes nous donnent l’occasion des développer ces univers riches et les personnages qui les peuplent.
Hagakure en est effectivement un très bon exemple avec tout un thème, un design et pas moins de 30 personnages uniques créés autour d’un jeu de plis très simple et épuré.
Il est sûr que le jeu de plis est revenu sur le devant de la scène. Dans ce contexte où le jeu de société moderne se démocratise, je pense que ce sont d’excellentes passerelles car ils permettent d’introduire des non-joueurs ou peut-être des joueurs d’autres générations par analogie avec des classiques comme le tarot, le whist et la belote. The Crew va beaucoup y contribuer effectivement et la comparaison avec le jeu est intéressante.
Comme dans The Crew, toutes les stratégies de Shamans viennent de la répartition des cartes et des choix des joueurs pour gérer leur main. La grande différence mécanique vient de l’absence de contrainte de pose qui induit une grande liberté pour construire des stratégies variées (élimination, collection, changement de camp, dissimulation) à partir des cartes, pouvoirs et objets disponibles. Combiné aux rôles cachés, cela ouvre la possibilité de bluffer sur ses véritables intentions et de maîtriser les signaux que l’on souhaite envoyer aux autres joueurs pour coopérer… jusqu’au moment de les trahir !
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Après le fantastique Lewis & Clark (dont la réédition est sur le marché depuis peu), et le déroutant Tea for 2 (remanier la mécanique de la bataille, il fallait oser !), Shamans nous raconte aussi une histoire mais avec l’imbrication originale de deux mécaniques très classiques. Les 3 jeux sont vraiment très différents, vous êtes plutôt un auteur « aventurier » donc ? Peut-être cherchez-vous encore votre « style » ?
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Cédrick : Auteur « aventurier » probablement, voire « explorateur », comme je l’ai décrit plus haut.
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J’ai découvert au gré des projets et de mes contacts avec le milieu du jeu, quelle pouvait être ma patte en tant qu’auteur. Il y a quand même des points communs entre mes créations. J’aime les jeux de type Eurogame « tendus » (de « tight » en anglais), aux choix impossibles, car je suis moi-même naturellement indécis.
J’aime aussi les thèmes très présents et une dose de hasard ne me déplait pas, du moment qu’elle est adaptée au thème et à la durée du jeu. Ainsi, je crée des jeux de gabarits assez différents, qui ne sont souvent pas faciles à présenter aux éditeurs.
Shamans en est un bon représentant. Il a la particularité d’être de loin ma création qui génère le plus d’interactions sociales.
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Le jeu n’a pas l’avantage d’être tout de suite accessible dans sa manière d’être joué, n’est-ce pas un risque, voire même un danger dans la configuration actuelle du marché du jeu de société, où j’ai l’impression que le jeu se consomme en largeur plutôt qu’en profondeur ?
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Thibault : Effectivement, c’est un vrai risque, et je me souviens m’être même un peu inquiété lors d’un premier jour de démonstration au festival professionnel de Vichy, où les boutiques cherchent à se former rapidement sur le plus de jeux possibles. Avec 15-20 minutes pour écouter les règles et jouer une manche de Shamans, j’avais l’impression que certaines pouvaient passer à côté de la profondeur du jeu. Je l’ai pris en compte immédiatement en essayant de souligner systématiquement toutes les décisions et leurs implications. C’est un des points forts de Shamans, la moindre carte jouée a beaucoup de conséquences : prendre ou pas la main, récupérer un artefact, progresser un Rituel, faire avancer l’Ombre, donner des informations sur ses objectifs…
Il y a eu plusieurs très bons retours presse autour d’Essen. Lorsque les gens prennent le temps d’entrer dans la mécanique du jeu, ils l’apprécient et au contraire, le trouvent très intéressant et gratifiant. Et le pari du style graphique semble payant, avec beaucoup de très gentils retours dès que nous publions des visuels !
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Cédrick : Je suis d’accord avec ça, et j’ai toujours ce problème avec quasiment toutes mes créations. De plus, il faut ajouter que Shamans peut être perçu comme « très clivant », il est loin de la mode actuelle des jeux « satisfaisants », qui font du bien en jouant, sans interaction négative.
Les anciennes créations d’Uwe Rosenberg (Agricola et sa famine !) ou évidemment de Stefan Feld, dans lesquelles les joueurs doivent jouer contre le jeu, m’ont beaucoup marqué.
Je suis au final très content que Studio H ait adopté Shamans malgré cela, c’est une véritable prise de risque. Je pense que je ne pouvais pas rêver meilleur éditeur.
Après avoir joué à Oriflamme et Hagakure à Cannes cette année, j’ai compris le lien avec Shamans.
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J’ai l’impression qu’avec ce jeu on découvre une nouvelle facette de votre travail, plus spirituelle et plus géométrique que vos illustrations sur les jeux précédents. Ce projet a été particulier dans votre approche de l’illustration ?
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Maud : En fait c’est plutôt une ancienne facette que j’aime travailler mais qu’on me demande trop peu souvent. J’avais adoré, y’a de ça 20 ans (Ho… pu…) faire les ombres chinoises des personnages du jeu de rôles AGONE de Mathieu Gaborit pour son fanzine le Souffre-Jour.
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Le rendu papier découpé est forcément un peu plus géométrique, voire design, en particulier pour SHAMANS.
Ce qu’on économise à illustrer dans des ombres, il faut absolument le restituer ailleurs. Pour éviter que ça soit trop fade et trop plat. Il faut de la matière, des lumières, des détails foisonnants, travailler la composition de chaque image pour la rendre singulière et immersive.
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Avec la sortie de ce jeu, 2021 s’annonce sous des cieux que l’on espère plus favorables aux animations ludiques, avez-vous prévu une communication particulière sur ce jeu ?
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Thibault : Tout à fait ! Ces derniers temps, ma devise a été de faire feu de tout bois, surtout au niveau événementiel. Shamans a été présent à toutes les occasions, en tournée cet été avec l’association Passion Jeux, et à Vichy et à Orléans, deux des rares festivals qui ont eu lieu sur la deuxième moitié d’année (Cédrick était même présent à Orléans et a mené quelques démos !).
Avec le contexte, j’ai également dématérialisé Shamans sur Tabletopia pour animer des démos au cours du Spiel Digital avec une petite équipe. Nous avons quand même eu environ 150 connectés du monde entier sur notre Discord, qui ont pu jouer à 4 jeux différents dont Shamans. Même si c’est incomparable, cette édition digitale restera pour moi un bon souvenir ! Le jeu a été présenté par tous les reviewers qui avaient organisé des couvertures spécial Spiel autour de fin Octobre comme Tric Trac, un Monde de Jeux et Ludovox.
Pour les boutiques ludiques, il y a eu tout un travail avec notre distributeur Gigamic également. Nous avons pu diffuser un présentoir en 3D dessiné par Maud reprenant les belles illustrations du jeu et préparer une belle brochure de 20 pages, mettant en valeur tous les aspects du jeu !
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Il y a également de belles opérations qui arrivent sur les réseaux sociaux : un Open the Box, un shooting incroyable, un concours avec des lots très… artistiques, etc. Le jeu est extrêmement riche, avec beaucoup de choses à dire au niveau du gameplay, et c’est un vrai bonheur de montrer le matériel sous toutes ses coutures ! Il y a également une vidéo un peu concept particulièrement chouette qui arrive, réalisée avec une certaine team de Québécois charismatiques… et leurs alter-egos shamaniques.
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Évidemment, nous serons sur les starting-blocks dès que nous aurons de meilleures chances de nous réunir en festival ! J’ai si hâte de voir le jeu tourner sur des tables de jeux et je rêve de réfléchir à un décor intégral et organiser des séances de dédicaces avec Maud !
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En parlant de 2021, que nous réservez-vous de beau et de nouveau, chacun dans votre domaine ?
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Maud : En janvier je démarre un premier livre illustré pour les éditions 404. Et plein d’autres trucs que je n’ai pas le droit de dire… Mais ça va être une année productive! Peut-être 3 ou 4 nouveaux jeux avec des univers bien différents et des styles graphiques encore pas mal variés. Grande hâte!
Cédrick : Je vais avoir un calendrier de sorties concentré avec pas moins de 3 jeux qui sortiront début 2021. Outre Shamans, il y aura Lueur chez Bombyx, un jeu résolument familial dans un univers fabuleux tout en noir et blanc (illustré par Ben Basso et Vincent Dutrait) avec plein de dés aux couleurs acidulés. Il s’agira de choisir des cartes et des dés qui se combinent au mieux, ce qui n’est pas toujours simple.
Il y aura aussi « Lost Explorers » chez Ludonaute, mon éditeur de cœur. Il s’agit d’un jeu à la mise en place ultra rapide (environ 2.5 secondes) composé essentiellement de jetons, assez abstrait, rapide et extrêmement casse-tête.
Un peu plus tard, est programmé un autre jeu chez Studio H est, un jeu à 2 « top secret ».
Thibault : Olalala on a un sacré semestre qui arrive ! Le studio entre dans son rythme de croisière avec pas moins de 6 jeux annoncés pour ce semestre. Cela va du jeu d’enquête au jeu d’adresse, de Cathala à Bauza, dans des univers aussi beaux que variés !
Après Shamans fin Janvier, nous avons en Février « Mandragora » de messieurs Cathala et Sirieix avec des dessins de Pierô ! C’est un jeu de collection très malin et tendu dans un univers de sorcellerie coloré. On y dévalise les boutiques en quête d’ingrédients et de grimoires magiques, tout en dosant le risque et les opportunités offertes à ses adversaires.
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Puis nous lançons fin Mars, la première boîte de la gamme « Suspects ». Il s’agit d’un jeu d’enquêtes coopératif de Guillaume Montiage, avec trois enquêtes relevées et immersives dans une ambiance à la Agatha Christie. Pour le tester, une enquête de démonstration complète arrive en boutique le mois prochain.
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En Avril et Mai, nous aurons deux jeux familiaux et fun dans des univers déjantés : « Fish N’Chips » et « Candy Islands ». Puis vers l’été arrivera un certain « Oltréé »…
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VERDICT
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Alors est-ce que ce jeu m’a transporté vers des dimensions spirituelles inconnues ?
Autant être honnête, la première manche de la première partie a été extrêmement plate. On découvrait un jeu de plis, donc de pose de cartes, sans en comprendre trop le sens, la genèse, l’essence.
Par contre oui, la magie a opéré directement au début de la seconde manche, quand on s’est tous aperçu du potentiel de ce que l’on avait devant nous ! Un jeu subtil, fragile, délicat, où chaque action de pose de carte prend du sens dans un « grand tout », comme si on découvrait subitement, derrière un grand drap noir, un univers inconnu !
Oui la magie a pris, quoi jouer, pourquoi, comment, à quel moment de la partie ? Autant de question qui se sont offertes à nous.
Nos regards sur le jeu avaient subitement changé, et nos regards sur les autres joueurs aussi, grâce à cette dimension particulière qui transporte le jeu dans un climat de suspicion malin et parfois oppressant.
Ne pas savoir qui et avec qui, le découvrir au fil des plis, mais tout en sachant que chacun peut bousculer, à l’aide d’une action bien placée, cet équilibre si précaire.
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Les actions sont nombreuses, et les règles fluides, le jeu nous fait explorer un monde particulier, qui se dévoile petit à petit, délicatement. Comme dans un rendez-vous amoureux, quand on se découvre lentement, par petites touches succinctes mais tellement importantes. Et où chaque mot a sa place, et où certaines émotions nous font presque déraper. Shamans procure des sensations fortes, accompagné de son univers connecté à des forces originelles, et sous ses airs de jeu de plis simple, cache un vrai défi, où la patience et la concentration seront vos principales armes.
Il faudra vous intéresser au jeu pour que lui s’intéresse à vous, il faudra l’apprivoiser, doucement, lui faire découvrir de nouveaux visages, pour qu’il vous livre ses secrets.
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Ne vous arrêtez pas trop rapidement, le chemin vers la plénitude ludique sera long et passionnant, et vous ne serez jamais seul !
Shamans est un jeu à apprivoiser, original, déstabilisant, campé dans un univers riche et enivrant, destiné à des ludistes qui ont déjà un peu d’expérience, et qui aiment être surpris.
Le jeu est magnifique, mais je vous assure qu’avec vous, il brillera plus haut dans le ciel !
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Tel un dandy anglais, promenons-nous au milieu des plantations de thé dans les montagnes de l’Himalaya en direction de Darjeeling en pleine révolution industrielle !
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Dans Alubari, de 1 à 5 joueurs vont donc s’affronter pour disposer de plantations sur les pentes himalayennes, construire le chemin de fer jusqu’à Darjeeling et développer les villes sur leur chemin.
Le jeu de Tony Boydell illustré par Cécile Guinement, édité par Studio H.
Il est prévu pour 1 à 5 joueurs, pour des parties de 50 à 120 minutes, et à partir de 14 ans.
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Matériel
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Le matériel est basique et de bonne qualité, les illustrations des cartes ne sautent pas au visage, le plateau lui est bien joli et son agencement permet une lisibilité des différentes zones.
Nous avons donc des cartes, pas mal de cubes, des marqueurs en bois et du meeple ouvrier. Bref, de quoi se faire un bon gros jeu de gestion comme on les aime ! Ah et une bien belle loco meeple !
Fiche technique : 58 cartes 59x87mm
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A quoi ça ressemble ?
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Comment on joue?
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C’est là qu’Alubari est bon comme une bonne tasse de thé chaud une après-midi hivernale sous un plaid.
Pour comprendre le gameplay du jeu, il nous faut décrypter le plateau central.
La partie débute dans la ville de Silguri Town. À côté se situe le point de départ de la ligne de chemin de fer qui vous mènera à Darjeeling. Le long de cette voie vous trouverez différentes villes avec des zones de gare à construire. Les différentes portions de voie sont séparées par des sections de rivière.
Quand une zone de rivière est construite, vous avez accès à toutes les zones de gare jusqu’à la prochaine zone de rivière.
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A côté de cette ville de départ se situe une roue qui permettra au jeu, si vous prenez trop votre temps, de venir vous mettre de gentils coups de pieds aux fesses pour vous rappeler que flâner est toujours agréable mais terminer ce chemin de fer est tout de même votre priorité.
À chaque fin de manche, en fonction du nombre de joueurs, on viendra tirer un nombre de cubes et si parmi ces cubes des blancs sont tirés, ils viendront se placer sur cette roue et déclenchent des actions pour accélérer la partie. Une mécanique simple et efficace qui gardera une pression sur les joueurs sans non plus gâcher le plaisir de jeu.
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En bas, une série de champs de thé est placée selon le nombre de joueurs. Sur chaque carte sont disposés des gravats en début de partie. Il vous faudra donc déblayer ces gravats pour devenir propriétaire de la plantation. Avoir le contrôle de plantations de thé est extrêmement important et occupera les joueurs durant tout le début de la partie. Non seulement les plantations et leur contrôle est prioritaire, mais déblayer les gravats vous donnera accès à cette matière première !
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En bas à droite vous trouverez les pistes de déblaiement, de pose de rails et de récolte. Chaque piste se verra modifiée par la météo de la manche. Le déblaiement précise combien de cubes de gravats vous pouvez retirer avec l’action associée. La pose de rails définit combien de portions de rails vous pourrez poser et la récolte définit le nombre de feuilles que vous récolterez lors des phases de récolte.
Si l’un des marqueurs des pistes de déblaiement et de récolte arrive en bout de piste, une récolte est déclenchée.
La récolte consiste à multiplier le nombre de vos plantations par le niveau de récolte actuel.
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Sur la droite du plateau se situent 3 pistes : de Chaï, de contrats et le suivi de la météo.
Le chaï est une ressource joker qui vous permettra d’effectuer des actions boostées ou de recruter un ouvrier supplémentaire pour la manche.
Les contrats sont des cartes recto verso qui vous font ajuster la météo puis, une fois retournées et placées dans une file, sont des contrats avec une action bonus.
Les contrats donc. Ce sont des objectifs que vous remplirez ou non en fin de partie comme un nombre de zones de gares construites ou un nombre de portions de rails posées. Les contrats disposent également d’une action unique. Choisir le bon contrat est donc important bien entendu pour l’objectif de points en fin de partie, mais ne sous-estimez pas l’action bonus qui pourrait bien vous aider !
Pour la météo, cela se passe en début de manche : la première carte de la file des contrats est défaussée puis on remplit la file. Ensuite la carte du haut de la pioche face cachée vous indique la météo à ajuster. La météo du tour en cours vient modifier les pistes de déblaiement, de pose de rail et de récolte. Vous aurez la météo des deux prochains tours déjà en place pour les anticiper.
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Le bandeau du haut du plateau permet le stockage de 3 des ressources du jeu et les actions possibles pendant la partie.
Pour les ressources, il s’agit des cubes sortis du sac à chaque manche qui ne sont pas blancs, avec du fer, de la pierre et du Chai.
Pour les actions, elles sont imprimées sur le plateau pour 3 joueurs, sinon il vous suffira de poser une carte sur chaque action pour adapter le plateau.
Ces actions sont celles qui seront effectuées par les joueurs une fois leurs ouvriers placés sur celles qui les intéressent. Vous allez dans un premier temps placer vos ouvriers un par un, chacun votre tour, puis les actions seront déclenchées dans l’ordre des cartes et pour chaque carte, si elle dispose de plusieurs emplacements, selon les numéros des emplacements.
Pour les actions il vous sera possible de :
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Récupérer des ressources parmi celles des réserves.
Déblayer les gravats présents sur les plantations de thé.
Échanger les ressources entre elles. Le fer vous permet de récupérer des barres d’acier, la pierre et les gravats peuvent être échangés l’un pour l’autre.
Poser des voies ferrées pour développer l’élément central du jeu : la ligne de chemin de fer vers Darjeeling.
La construction d’une zone de gare ou l’achat d’un équipement. Les équipements sont des locomotives qui vous apportent des bonus et des points de victoire. Mais attention ces équipements nécessiteront un coût d’entretien via la roue des événements.
Le bureau de poste pour revendiquer de nouveaux contrats.
Le chaiwala pour récolter des feuilles de thé dans vos plantations ou échanger vos feuilles de thé issues de vos récoltes en chaï.
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Une manche de Chaï se déroule donc simplement :
Ajustement des contrats
Modification de la météo (possible récolté)
Approvisionnement des entrepôts (possible événement déclenché par le jeu)
La pose des ouvriers
La résolution des ouvriers dans le sens des cartes
Et voici comment se déroulent les manches jusqu’à ce que la fin de la partie soit déclenchée par la pose de la dernière portion de chemin de fer jusqu’à Darjeeling ou qu’un joueur ait posé tous ses disques. Vous finirez la manche avant de passer au scoring.
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Chaque joueur prend des points avec ses plantations de thé, avec ses zones de gare, par ses sections de voies contrôlées, par ses cartes contrat complétées, ses cartes équipement et pour finir avec le chaï et les feuilles de thé en réserve.
A noter que votre score peut finir en ½ point ce que je trouve atypique et chouette !
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VERDICT
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Alubari c’est l’élégance des mécaniques de jeu au service de l’immersion et de la fluidité de la partie.
Le matériel est top, le gameplay est tellement simple qu’en un tour de jeu tout le monde sait jouer et pourtant on ne s’y ennuie jamais et la rejouabilité est à chaque fois au rendez-vous ! J’y vois des reflets de Lacerda dans cette incorporation des mécaniques au thème, une sorte de Lacerda mais presque familial.
L’interaction est forte mais jamais directe, on se bat pour des emplacements, on ne vient pas saboter le jeu de son adversaire.
Alubari reste une course où les contrats sont primordiaux et choisir les bons pour les remplir et assurer votre scoring est important.
Le jeu fonctionne dans toutes ses configurations de 2 à 5 joueurs, je n’ai pas testé le solo.
Et l’automa intégré à chaque partie est excellent, il vous forcera à avancer sans pour autant vous frustrer.
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Alubari est un jeu qui m’a complètement bluffé et qui ne quittera pas ma ludothèque de sitôt. Une perle.
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